L’inégalité sociale au sein du système éducatif français reste une réalité persistante, comme le démontre une récente note d’information du Ministère de l’Éducation nationale. Cette étude, publiée en avril 2025, analyse en profondeur le profil social des lycées à travers l’Indice de Position Sociale (IPS), un indicateur qui synthétise les conditions socio-économiques et culturelles des familles d’élèves.
Qu’est-ce que l’Indice de Position Sociale (IPS) ?
L’IPS est un outil essentiel pour comprendre la composition sociale des établissements scolaires. Il attribue à chaque élève une valeur de référence basée sur la catégorie socioprofessionnelle de ses responsables légaux, résumant les attributs favorables à la réussite scolaire. Plus l’IPS est élevé, plus le milieu familial offre des conditions propices à l’apprentissage.
Pour l’année scolaire 2024-2025, l’IPS moyen national des lycées publics et privés sous contrat s’établit à 109, avec des écarts considérables allant de 59 pour le lycée le plus défavorisé à 162 pour le plus favorisé.
Des écarts marqués entre public et privé
L’une des disparités les plus frappantes concerne la différence entre secteurs d’enseignement. Les lycées privés sous contrat affichent un IPS moyen de 125, nettement supérieur à celui des établissements publics qui se situe à 105. Cette différence s’explique par plusieurs facteurs :
- Les établissements privés ne sont pas soumis à la sectorisation, contrairement aux lycées publics
- Ils peuvent sélectionner librement leurs élèves, qui sont majoritairement issus de milieux sociaux favorisés
- Le financement partiel par les contributions des familles renforce la sélection sociale à l’entrée
Cette réalité se traduit par des chiffres éloquents : plus de 90% des lycées privés sous contrat ont un IPS supérieur ou égal à 100, tandis que cette proportion tombe à un peu plus de 50% pour les établissements publics.
Des inégalités selon le type d’établissement
Le type de lycée constitue également un facteur déterminant dans la composition sociale des établissements :
Type de lycée | IPS moyen | IPS dans le privé | IPS dans le public |
---|---|---|---|
Général et technologique | 121 | 129 | 114 |
Polyvalent | 104 | 115 | 101 |
Professionnel | 92 | 104 | 87 |
Les lycées généraux et technologiques (LEGT) accueillent des élèves nettement plus favorisés que les lycées professionnels. Les établissements polyvalents occupent une position intermédiaire avec un IPS moyen de 104.
L’écart est particulièrement marqué pour les lycées professionnels publics, dont l’IPS moyen tombe à 87, confirmant leur rôle d’accueil des élèves socialement les plus défavorisés.
Une géographie des inégalités sociales scolaires
La cartographie des IPS par département révèle de fortes disparités territoriales :
- Les lycées des départements d’outre-mer figurent parmi les plus défavorisés, avec un IPS inférieur à 90 pour Mayotte (71), la Guyane et La Réunion
- En métropole, la Seine-Saint-Denis (93) se distingue comme l’un des départements les moins favorisés
- À l’inverse, Paris (129), les Yvelines (125) et les Hauts-de-Seine (125) concentrent les établissements les plus favorisés socialement
Cette répartition reflète les écarts socio-économiques plus généraux entre les territoires français.
Le rôle des formations post-bac dans l’accentuation des inégalités
L’étude révèle un mécanisme préoccupant : la présence et la répartition des formations post-bac renforcent les écarts entre établissements favorisés et défavorisés.
Les classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE) se trouvent majoritairement dans les lycées généraux et technologiques (22% d’entre eux en accueillent) et très peu dans les lycées professionnels. Ces sections accueillent des élèves très favorisés (IPS de 141) et sont implantées dans des lycées déjà privilégiés (IPS moyen de 134).
À l’inverse, les sections de techniciens supérieurs (STS) sont plus présentes dans les lycées polyvalents (81%) et accueillent des élèves de milieux plus modestes (IPS de 101). Les lycées proposant uniquement des STS ont un IPS moyen de 106, contribuant ainsi au renforcement des écarts sociaux entre établissements.
Un système qui reproduit les inégalités
Cette analyse du profil social des lycées français en 2025 met en lumière un système éducatif qui, loin de corriger les inégalités sociales, tend à les maintenir voire à les renforcer. La concentration des élèves favorisés dans certains établissements et filières, particulièrement dans le secteur privé sous contrat et dans les formations d’élite, pose la question de la mixité sociale au sein du système éducatif.
L’IPS s’avère ainsi un indicateur précieux pour mesurer et comprendre ces disparités, étape indispensable pour envisager des politiques éducatives plus équitables et inclusives.